The Rolling Stones
Love You LIve
par Lo Jez
In 1977
No Elvis, Beatles or
the Rolling Stones
le mot d’ordre
quand il vient des Clash
sur leur 1er album
et que tu t’évertues à chanter
comme eux dans ton magnétophone
à bande
qui te sert d’ampli/voix guitare
tu ne t’amuses pas
à écouter ou acheter
un disque de ces vieux connards
milliardaires
t’es trop punk pour ça.
Oui, mais y’a deux ans
y’avait pas de punk
et on écoutait les Stones
et l’an passé j’ai voulu
aller les voir au Abattoirs
à Paris
mes parents moins
donc facile de dire que je m’en fous
mais dans ma chambre
ils sont dans mes oreilles
et ils sortent un live
un truc un peu pourri
avec des prises un peu partout
mais aussi au fameux concert
de Paris
quand Keith vient d’apprendre
la mort de son fils
et joue quand même
dans son nuage psychotropique électrique
Jamais je n’achèterai ce disque
encore aujourd’hui quand je le vois
je feuillette la pochette
ce portrait de Jagger par Warhol
mordant la main d’un enfant
Barbe Bleue monstrueux
dégoulinant de couleurs criardes
oui mais il y a ce je ne sais quoi
enfin si je sais
cette face live dans un club à Toronto
ils s’amusent
eux aussi sont des punks
Mick n’a que 34 ans,
alors ils se retrouvent là et sortent les standards
Mannish Boy, Around & Around, Little Red Rooster
Jagger est plus black que jamais
il tchatche, fait son entertainer
comme si
personne ne les connaissait
les autres sont à la ramasse
Charlie à deux à l’heure, Ron Wood perdu
dans des solos pour stade
Bill…où est Bill ?
Billy Preston pianote funky
Reste Keith, accroché à son manche, qui envoie
en fond sonore une pure rythmique méchante
alors oui ils sont punks,
et certainement plus que beaucoup
vous allez voir
nous aussi on peut mal enregistrer
des mauvaises versions de bons morceaux
et capter depuis le fond d’un club
un show foutraque
pas besoin de scandale, de fuck, de Queen
ils sont le scandale,
celui ci les suit
avant et après leur passage
ils peuvent nous faire croire à l’amour
ce titre nul : Love You Live
mais c’est de la morgue de branleurs doués
gravée là
entre les sillons
ça pue le bordel, le n’importe quoi,
la fin d’un groupe
pour des êtres normaux
mais ce n’est même pas la 1ere moitié
de leur carrière
ils ont déjà perdu les fans de Brian Jones
ils s’en foutent
ils jouent au El Mocambo
à Toronto
pour eux, leurs dealers leurs gonzesses
et tout un catwalk
de suiveurs magnifiques
qu’ils écrasent
comme on fait souffrir et hurler
une pédale d’effets
et puis
What’s Wrong with You ?
Oh Yeah You’re Crackin Up !
Bo Diddley façon skanking
elle est là la
Punky Reggae Party
et Mick agite son p’tit cul
arrondi ses grosses lèvres
sur la boule du micro
1963 c’était il y a 14 ans
et les gamins étaient déjà punks
comme ces traits de crayons que Jagger
s’est permis de grabouiller
sur le tableau original de Warhol
On est en 1977
ce Love You Live
sera définitivement
oublié, méprisé
et jamais je ne l’achèterai
Lo Jez est auteur, journaliste et réalisateur de documentaires rock.