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O.T.H

Réussite

Rosebomb

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On Tender Hooks.

Trois lettres désormais légendaires, un O, un T, des points et un H, dans un désordre absolu, revendiqué. L’A75 n’était pas entièrement terminée mais on a passé sans trop de chauffe le plateau de Lempdes, Puy-de-Dôme, et foncé au Club 3000, une salle qui n’existe que dans les souvenirs de celles et ceux qui lont arpentée.

Quatre en 4L, c’était le quota maximum d’après la notice constructeur. Alors on appréciait le paysage et comme on n’avait pas d’autoradio-K7 on chantait à tue-tête quelques refrains de ‘Réussite’, le premier album d’O.T.H.

Au volant, Sandrine. C’était la sœur d’un de mes potes, qui s’était réservé le siège côté conducteur. S’il avait pris la place du mort c’est parce qu’il voulait pas qu’on déconne avec sa frangine pendant qu’elle conduisait. Elle étudiait des trucs savants à la faculté, elle avait un putain de c…aractère, une piaule sur place et un permis de conduire valide.

Ce soir-là, on était presque grands et on allait les voir là-bas, dans la capitale de notre monde, à Clermont-Ferrand. En arrivant j’ai appelé mes parents d’une cabine téléphonique, pour dire que j’étais vivant.

C’était pas très punk comme attitude mais ça se faisait, dans le temps…

Fallait se lever tôt pour le trouver, cet album. Fallait s’intéresser un peu, chercher, lire, écouter, trier, s’informer.. Sans octets, sans gigas, sans autres réseaux que des publications photocopiées à l’arrache, reçues par courrier, qui inondaient alors l’entreprise publique qu’était les P, T et T, et distribuées de manière très ordonnée en ces temps plus régaliens.

Vu de ce siècle, c’était un peu notre Far West à nous. Du papier qui voyage..

Fallait un peu, aussi, contrer le courant. Bref on se gare, on s’extrait de la tôle, on bouffe un truc et on se rend boulevard Desaix, dans le centre, pas loin de la Place de Jaude.

J’avais déjà vu des salles de fête, de bal ou de quine scolaire en meilleure forme. C’était une sorte de bar un peu miteux, une boîte de nuit un peu poisseuse. La scène, située dans un recoin exigu, faisait la hauteur d’une marche; on n’avait pas d’argent pour se prendre une bière alors on s’est mis devant, chauds comme des braises.

Autour : pas une âme, et pas grand monde.

Juste une connaissance, punkette d’opérette qui criait ‘A poil’ entre deux rots, le genre qui mange jamais rien mais qui boit pas que des paroles, trois quatre autochtones dans le fond et nous. On se regarde, on fait comme si, mais on se dit que le groupe va être aussi nombreux que son public.

Mal-être.

Ils arrivent, et ils jouent.

Vite et fort.

Le lendemain, on rentre fissa par le premier train et on décide de former un groupe de rock.

On venait de comprendre que nos références s’arrêtaient là ; qu’on allait devoir désapprendre, oublier ce qu’on avait déjà entendu, tout réapprendre et tout recommencer, en français. Que cette pochette, loin de nous avoir charmée la première fois qu’on l’avait vue, renfermait le disque d’une génération.

La nôtre.

J’ai mis des années à comprendre le rapport entre ce titre et cet étalage de cartes à jouer, érotiques et d’un autre âge, sur ce recto.

Une ‘Réussite’ on m’a expliqué, c’est comme une belote chez Pagnol mais c’est pas entre amis.

C’est seul dans son coin, comme un con.

Sur des charbons ardents.

R.Rosebomb – Novembre 2022

R.Rosebomb est bibliothécaire musical. Clivant éditorialiste de fanzines, mauvais guitariste, passable gestionnaire de punks locaux, on le voit parfois sillonner les routes du Cantal au volant de sa vieille Simca.

 

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