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Dogs

Too Much Class For The Neighbourhood

Mathieu David Blackbird

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La pochette du troisième album des Dogs n’est certainement pas la plus belle de l’histoire de la musique enregistrée. On attribuerait plus volontiers cette distinction au Look Around de Sergio Mendes & Brasil ‘66 –l’essence du cool – ou au mirifique Out To Lunch ! d’Eric Dolphy. Ce n’est même pas la plus belle du groupe – on lui préfèrera aisément celle de Different, réalisée par Jean-Baptiste Mondino ou de 4 of a Kind. Elle ne revêt pas non plus un caractère énigmatique comme celle de Three Imaginary Boys ou d’Unknown Pleasures. Elle n’est ni l’œuvre d’un graphiste novateur comme Peter Saville, Vaughan Oliver ou Julian House ni devenue une icône de la pop culture comme celle de The Velvet Underground & Nico ou London Calling.

C’est pourtant la seule à avoir jamais été accrochée au mur de ma chambre d’adolescent.

Ce n’est que bien des années après avoir écouté le disque pour la première fois que j’apprendrai que ShakinWith Linda, qui ouvre Too Much Class For The Neighbourhood, est en fait une reprise de Mitch Ryder and the Detroit Wheels, mais il s’avère que ce fut ma toute première rencontre avec les Dogs.

Le disque était sorti en 1982 et c’est peu d’écrire qu’à titre personnel l’année avait été éprouvante : j’avais failli redoubler ma cinquième à cause d’une professeure de mathématiques du genre sadique et pour couronner le tout il y avait eu le traumatisme de la demi-finale de Coupe du Monde RFA-France – ne me lancez pas sur le sujet.

1983 se montrait heureusement bien plus douce et enjouée. Je commençais à sérieusement m’intéresser à la musique et c’est ainsi que mon oncle Jean, communément appelé ‘Tonton Jean’ à l’époque, et qui travaillait dans le commerce du disque en gros, m’offrit un beau jour une version Picture Disc de l’album.

Il s’agissait probablement d’un exemplaire promotionnel dont il ne savait que faire, lui qui ne jurait à l’époque que par Dire Straits, et que j’ai d’abord accroché au mur de ma chambre pendant plusieurs mois – c’était mon premier Picture Disc et je trouvais cela exotique – avant de me décider à l’écouter et de tomber totalement sous le charme de ce groupe dont je n’avais jusqu’alors jamais entendu parler. J’avais 13 ans et même si je n’allais pas tarder à me passionner pour la presse musicale, ma culture sur le sujet était encore pour le moins embryonnaire. ShakinWith Linda, The Most ForgottenFrench Boy ou Too Much Class For The Neighbourhood – autant de petites merveilles racées et tout bonnement irrésistibles qui constituèrent un choc auditif et dont l’écoute maintes fois répétée n’a, à ce jour, jamais atténué l’onde. J’accrochais de nouveau le disque au mur entre chaque écoute et finirai quelques années plus tard par investir dans une version standard – puis une seconde.

On doit le cliché utilisé pour la pochette à Bruno Le Trividic, journaliste et photographe qui suivait la formation Rouennaise depuis le tout premier single et qui organisa la séance à son domicile.

Les 4 Dogs nous regardent quelque peu de travers comme si nous venions soudainement de troubler leur intimité – alors qu’en ce qui me concerne ce sont plutôt eux qui ont fait irruption dans ma vie pour ne jamais plus en repartir.

Il y a là l’élégant et longiligne Dominique Laboubée, cigarette à la main – et qui 20 ans plus tard s’en ira rejoindre Brian Jones et Gene Vincent. Michel Gross, chaussettes rouge vif, l’imitera en 2018. Hugues Urvoy de Portzamparc, le taciturne bassiste, a noué une cravate pour l’occasion. Ils sont tous deux assis sur un petit canapé dessiné à l’origine en 1928 par l’architecte Le Corbusier. Antoine Masy-Périer, nouveau venu à la belle chemise à pois et véritable zébulon de la bande, complète le carré magique.

Paquet de Pall Mall bien en évidence sur un petit bureau, Elvis Presley à la télévision et Rickenbacker au repos sur un fauteuil : tout ici est soigneusement mis en scène mais à l’époque j’imaginais que le néo-quatuor partageait une grande maison et avait fait une pause entre deux répétitions le temps de se faire tirer le portrait –le portrait du plus grand groupe français du monde.

Il y avait pire pour s’initier aux joies du Rock and Roll.

Madridiste obsessionnel et grand admirateur de Paul Mc Cartney devant l’éternel, Mathieu David Blackbird aime le Chablis, la nourriture (végétalienne) épicée et la Pop Culture. Il écrit pour plusieurs revues dont Persona.  

 

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